Chroniques

Lettre ouverte à Nicolas HULOT

(Publiée à l’occasion de la Conférence Climat Energie du 25 juin 2014)

Mon cher Nicolas, bravo, mille fois bravo pour ton inlassable investissement pour le respect des grands équilibres de la vie. A défaut de changer le Monde, nous assistons partout aux belles actions de tout ceux qui, contre vents et marrées, ne baissent pas les bras, investissent, donnent l’exemple. La pression monte et tu constates un frémissement des décideurs qui ne pourront plus bien longtemps résister à cette vague du bon sens et du civisme de ces citoyens.
Contre l’inertie administrative, financière, des mentalités, des cultures, etc. et contre la concentration des pouvoirs, le combat est rude. Mais tu ne désarmes pas. Bravo.


Nous vivons au paradis mais nous ne le savions pas ou nous l’avions oublié. Les images que tu nous as montrées en témoignent. Nous croyons que la planète a besoin de nous, mais c’est exactement le contraire. Sans une belle planète riche et équilibrée, l’espèce humaine ne peut s’épanouir. Notre seul devoir est de bien l’observer, de bien l’étudier, de bien la connaître, ainsi nous l’aimerons et la respecterons davantage. Nous n’avons rien à lui apprendre, bien au contraire, c’est à partir des mille et uns mystères de la vie terrestre que nous tirons toutes nos connaissances. Alors, il faut le répéter, ceux qui détruisent notre planète sont des criminels, ils détruisent la maison des générations futures, ils détruisent l’humanité.


Ce que l’on peut déplorer, c’est que cette idée fondamentale a du mal à pénétrer nos esprits.
Le monde de plus en plus artificiel dans lequel nous vivons nous empêche de voir et de comprendre. L’avenir de l’humanité est unique et nous prenons mille chemins différents, nous nous égarons. Il faut un grand dessein à cette humanité pour aller tous dans le même sens.
Puisse l’exemple de cette ile de La Réunion diverse, multicolore mais unie, inspirer le reste du Monde pour que ce grand dessein de préserver notre espèce, ne reste pas lettre morte.

 

Transition énergétique Réunionnaise, un modèle pour le Monde ?

 

Des solutions qui pourront d’ailleurs servir de modèle au reste du Monde, semblent aujourd’hui se dessiner pour une indépendance énergétique durable de l’ile de La Réunion et pour une maîtrise des prix de son énergie (carburant aussi bien qu’électricité).


Ce soleil diablement intermittent qui fait notre richesse va enfin pouvoir être utilisé massivement pour alimenter à 100 % ou presque, notre réseau électrique. Puisqu’il ne brille que le jour (mais combien fortement l’été), il fallait trouver une solution pour la nuit. Sur le papier, c’est aujourd’hui chose faite. Ce miracle nous ne le devons pas à une technique complexe ou révolutionnaire, mais au contraire ancienne et éprouvée. Il s’agit tout simplement d’exploiter intelligemment l’énergie hydraulique. Ce petit miracle d’efficacité, de rusticité et de sécurité se nomme STEP (Stockage d’Energie par Pompage). La station STEP représente le complément idéal de notre belle, généreuse mais intermittente énergie solaire. Sur le plan écologique et environnemental, elle représente même un fantastique progrès car elle doit permettre de libérer nos rivières de l’emprise de l’homme et de rendre à la Nature et aux poissons un milieu proche du milieu originel.

 

En effet, contrairement à un barrage hydraulique classique, une station STEP fonctionne en circuit fermé. Composée de deux bassins, un en basse altitude, un autre en hauteur, la station n’est alimentée en eau qu’une seule fois, lors de sa mise en service. L’ouverture des vannes du bassin d’altitude permet de fournir de l’énergie la nuit. Le jour, aux heures les plus chaudes où l’énergie solaire est abondante mais peu utilisée, le surplus d’électricité produit par les panneaux solaires permet, par pompage, de renvoyer cette eau dans le bassin supérieur. Les véhicules électriques urbains pourront alors s’alimenter sur le réseau sans craindre d’augmenter notre consommation d’énergie fossile (il faut savoir qu’aujourd’hui cette dernière produit plus de 50% de notre électricité insulaire).

 

Les véhicules électriques à grande autonomie équipés de la nouvelle pile à combustible pourront également être alimentés de manière écologique et durable puisque l’hydrogène utilisé par ces piles pourra également être produit par électrolyse de l’eau grâce à cette surproduction d’énergie solaire. De plus, comme les STEP, l’hydrogène est un bon moyen de stocker l’énergie et représente donc un stock de sécurité supplémentaire pour assurer l’alimentation de notre réseau électrique insulaire en cas de besoin.


On peut donc parfaitement affirmer aujourd’hui que La Réunion, si elle le souhaite, est en mesure d’accélérer sa transition énergétique. Elle pourrait ainsi atteindre les objectifs affichés de l’autonomie énergétique en 2030 pour l’électricité, mais également (et cela n’a jamais été affiché), pour quasiment tous ses carburants. Les prix de nos énergies insulaires, quand à eux, ne dépendront plus du marché mondial mais uniquement des durées d’amortissements des capitaux investis, et, bien entendu du régime fiscal qui sera appliqué à ces nouvelles énergies.

 

 

Courrier publié par le Nouvel Observateur du 8 mai 2014.